Qui suis-je ? Moi, le valeureux politicien incompris

Qui suis-je ? Moi, le valeureux politicien incompris
Je suis ce politicien au parcours sinueux, mais au discours droit comme un I. Petit par la taille, mâchoire serrée, je me donne des airs de dur à cuire. Je suis le modèle à suivre, la conscience nationale, la dernière sentinelle de la République. Les autres trahissent, hésitent, marchandent… moi, je résiste. Du moins, c’est ce que je me répète chaque matin devant mon miroir.
J’ai été démis par le régime de Macky Sall. Enfin… officiellement, j’ai démissionné. C’est plus élégant. Plus héroïque. En réalité, je n’étais plus dans leurs petits papiers, alors j’ai sauté avant d’être poussé. Mais chut, on ne casse pas le storytelling.
Ensuite, comme tout grand visionnaire incompris, j’ai créé mon propre parti. Parce que dans mon esprit, je suis incontournable. À chaque élection, je tente ma chance en solo. Et à chaque fois, le peuple me répond par un silence poli. Alors je finis toujours par me coller à une coalition, pour grappiller un mandat ou un strapontin. Stratégie ou survie politique ? Disons… flexibilité.
Mes amis deviennent mes ennemis, mes ennemis deviennent mes alliés. Je suis l’homme des principes… réversibles. Hier, je dénonçais la brutalité du pouvoir. Aujourd’hui, me voilà sur la même table que ses bras armés d’hier. Main dans la main avec ceux que j’accusais de répression, pour déposer un recours ou signer une déclaration solennelle. La politique a ses raisons…
Et puis, il y a ce moment glorieux. Ce tournant historique. Ce remaniement constitutionnel où il s’agissait de ramener le mandat présidentiel de 7 à 5 ans. Une vraie occasion de montrer qu’on est un homme de parole. Mais lui, l’homme “intègre”, a préféré organiser un référendum. Et moi ? Moi, j’ai soutenu ce reniement. Oui, j’ai appelé les Sénégalais à voter “OUI”. Pour que Macky reste. Parce que, voyez-vous, la parole donnée peut se renégocier. Quand c’est “pour le bien du pays”, bien sûr.
Ah, et parlons de Karim Wade. Je l’ai combattu. Férocement. J’ai applaudi à son emprisonnement. De toute façon, le PDS et moi, ça n’a jamais collé. Déjà à l’époque de la CREI, je ne l’ai pas lâché. Mais mieux encore : c’est moi qui ai introduit le recours pour faire invalider sa candidature à la présidentielle. Et aujourd’hui ? Aujourd’hui, me voilà assis autour de la table de Takku Wallu, en discussion politique avec ses camarades. Ahhh, la politique et ses bizarreries…
Mais ne vous méprenez pas. Tout ce que je fais, c’est pour le peuple. C’est pour la vérité. C’est pour la République.
Je suis ce politicien qui confond intégrité et opportunisme, constance et obsession, courage et mise en scène. Je suis ce professionnel de la contradiction qui parle de principe, mais marche toujours avec ceux qu’il dénonçait hier.
Je suis ce héros autoproclamé, ce stratège solitaire, cet éternel recalé du suffrage universel.
Je suis… vous savez très bien qui je suis.
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PMD
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