DISPARITION DE MAME LESS CAMARA La référence tire sa révérence
DISPARITION DE MAME LESS CAMARA
La référence tire sa révérence
Il a vécu dans la plus grande dignité. Une vie professionnelle bien remplie. Mame Less Camara qui est décédé le 29 avril 2023, était un journaliste de renom, une icône, une référence à tout point de vue.
Par El Hassane SALL
Avec la disparition de Mame Less Camara, c’est toute la presse qui perd une référence. Référence, l’homme l’était et ce, dans tous les domaines. D’ailleurs les témoignages ont été unanimes à son sujet. Mame Less fut une référence pour le monde de la presse, tant par son comportement, sa probité intellectuelle et morale, son humilité. Pour couronner le tout, il avait l’éthique et la déontologie, chevillées au corps. Ce qui fascinait le plus chez Mame Less est le fait que, malgré l’étendue de son savoir, il a su toujours rester humble. Pour preuve, nommé directeur de la rédaction dans un grand groupe de presse pour qu’il y apporte son savoir-faire, il déclarait ceci « je suis dans la posture d’un apprenant. » Cela montre comment il était simple. C’est pourquoi aussi bien à la cérémonie de levée du corps qu’à l’inhumation, les mots n’ont pas manqué pour qualifier l’homme. Mame Less était journaliste et il l’est resté jusqu’à son dernier souffle. Malgré des hauts et des bas, il a su garder sa dignité et ses principes. Pourtant il pouvait choisir le chemin le plus facile, c’est-à-dire verser dans la compromission en allant s’acoquiner avec le pouvoir ce qui lui aurait permis de vivre un train de vie princier. Mais non ! Selon ceux qui l’on côtoyé, Mame Less aurait pu tout avoir mais il était incorruptible.
« Le savoir au-dessus de l’avoir »
« Rien ne l’impressionnait, si ce n’était la connaissance. Un jour, un homme riche lui a fait visiter sa maison si spacieuse, si grande, si impressionnante. A la fin de la visite, Mame Less s’est dit attristé et avait vraiment pitié de cette personne. La raison ? Il n’avait vu aucun livre dans la splendide villa », rapporte le journaliste Mame Gor Ngom qui a eu à côtoyer l’homme. Et il tire cette moralité de cette anecdote : le savoir vaut mieux que l’avoir.
Pour Less, un journaliste devait rencontrer un homme politique, pas le fréquenter. Mame Less qui a beaucoup contribué au rayonnement de la presse est parti au moment où cette dernière traverse des jours sombres de son histoire. Une situation que la presse avait vécue au lendemain de l’alternance. Analysant les rapports heurtés entre la presse et le pouvoir Mame Less avait tenu ces propos qui restent d’une brulante actualité : « le nouveau pouvoir a compris très vite la capacité de nuisance de la presse contre ceux qui gouvernent et la bonne preuve lui avait été administrée en février et mars 2000 (…) Maintenant souligne-t-il « le nouveau pouvoir issu de l’alternance se doutait que la presse privée qu’il ne contrôlait pas pouvait se retourner contre lui comme elle a eu à le faire contre l’ancien régime et contre son président. C’est pour cela qu’il y a eu des relations très heurtées entre le nouveau pouvoir et la presse pendant au moins deux ans, avec ce cortège de journalistes convoqués à la Dic. Aujourd’hui l’actuel pouvoir a perdu beaucoup de son capital d’estime dans certaines rédactions ».
Un monument s’en est allé
Pour Mame Less Camara, on a l’impression que le pouvoir est en train de subir un retour de bâton, surtout après le nombre de conflits aigus intervenus avec certains groupes de presse de la place dont Sud quotidien et Walfadjri. Manifestement, les relations ne sont pas des meilleures, mêmes si de part et d’autre, on est obligé de négocier. « Je pense que la conception du pouvoir issu de l’alternance est assez hégémonique pour ce qui est du contrôle de la presse, alors que cette dernière pense avoir acquis plus de liberté. Elle pense qu’elle y a droit pour s’être battue et de l’autre côté le nouveau pouvoir pense avoir besoin d’une presse d’accompagnement. On se trouve face à une sorte de malentendu qui n’est pas prêt de se dénouer. Et les prochaines consultations électorales seront aussi une grande période de confrontations entre presse et pouvoir. » Des propos dont on croirait qu’ils datent d’aujourd’hui tellement les situations d’hier et d’aujourd’hui sont similaires, pourtant Less les avait tenus en 2005. Cet exemple montre comment ses analyses étaient objectives et justes. Pour dire que, plus qu’un monument, Mame Less était une rivière très profonde mais qui coulait dans un silence majestueux !
Que la terre de Yoff où il repose désormais lui soit légère.
A toute sa famille, la rédaction présente ses condoléances attristées
SOURCE : TRIBUNE