APAISEMENT DU CLIMAT SOCIAL AU SENEGAL APRES LE RENONCEMENTDE MACKY SALL Après l’ivresse, gare à la gueule de bois Par El Hassane SALL
APAISEMENT DU CLIMAT SOCIAL AU SENEGAL APRES LE RENONCEMENTDE MACKY SALL
Après l’ivresse, gare à la gueule de bois
Par El Hassane SALL
Depuis qu’il a annoncé qu’il ne briguerait pas un troisième mandat ou second quinquennat pour parler comme ses partisans, les félicitations à l’endroit du président Macky Sall fusent de partout. Même ses thuriféraires qui investissaient les plateaux de télévision pour l’obliger à se renier en théorisant leur fameux second quinquennat ont troqué leur riti avec un bongo pour clamer à tue-tête que leur champion est un vrai « lamtoro », un « homme de parole » « homme de valeur ». Bref aujourd’hui chacun rivalise de dithyrambe avec un zèle inégalé alors que si le président Sall les avait suivis sur le chemin qui mène au second quinquennat, nul doute que le pays serait aujourd’hui dans le gouffre. Seulement à y regarder de près, le président Sall n’a rien fait d’exceptionnel qui mérite cet enthousiasme excessif. S’il avait en son temps réduit son septennat de deux ans comme promis et effectué deux quinquennats, il aurait certes mérité tous les éloges car il aurait fait quelque chose d’inédit. Mais il n’a fait que rendre au peuple ce qu’il lui a donné. Franchement, quel mérite peut-on attribuer à un président qui a juste décidé de respecter la Constitution de son pays qui dit que « nul ne peut exercer plus de deux mandats consécutifs ». Un pays qui lui a tout donné et qu’il a l’obligation de lui restituer la gestion qu’il lui a confié pour une durée limitée dans le temps. Lequel président avait été élu sur la base de sa promesse sobre et vertueuse et 12 ans après on se met à chanter ses louanges parce qu’il a respecté la Constitution. Pouvait-il faire autrement d’ailleurs, car c’était soit respecter les deux doses prescrites soit l’overdose avec tous les risques encourus. En 1980, au moment où la présidence à vie était de mode en Afrique, le président Senghor a volontairement quitté le pouvoir qu’il avait légué à son dauphin Abdou Diouf, une situation exceptionnelle en son temps mais on n’avait pas assisté à un tel déluge d’éloges de la part de ses partisans. En 2000 aussi, Abdou Diouf est parti avec les honneurs alors qu’il avait été battu mais il a su organiser les meilleures élections qui soient dans l’histoire du Sénégal, lesquelles avaient permis à l’alternance. Mais ce qui est inquiétant dans la situation vécue aujourd’hui est l’euphorie dans laquelle baigne une bonne frange des Sénégalais alors qu’on n’est pas encore sorti de l’auberge. Parce que le renoncement du président Sall à la troisième candidature règle un pan du problème mais ce n’est pas le problème. Le problème majeur que doit régler le président Sall c’est tout d’abord celui qui agite le pays depuis 2021, celui de Ousmane Sonko qui draine des milliers de supporters. Un vrai casse-tête pour le pouvoir car autant il est convaincu que le leader de Pastef est coupable et qu’il doit purger sa peine, autant une bonne frange des Sénégalais est convaincue à tort ou à raison que Sonko est innocent est que tous ses déboires judiciaires ne sont qu’un prétexte pour le régime qui veut lui barrer la route du Palais de la République. Condamné à deux ans de prison pour corruption de jeunesse, il est actuellement en résistance surveillée pardon résidence surveillée. Par conséquent cette situation ne peut pas perdurer et il faudra nécessairement y mettre un terme en allant cueillir le teigneux opposant. Comment l’Etat s’y prendra-t-il ? Cette tâche sera-t-elle facile ? Une question qui mérite réponse d’autant que le constat est qu’à chaque fois que le leader de Pastef est arrêté, le pays bascule dans la violence. Donc malgré l’annonce de la non candidature de Macky Sall en 2024, l’incertitude plane toujours sur le pays et il risque d’y avoir des bouleversements d’ici 2024 avec la guerre de succession qui risque d’être âpre au sein du parti Etat mais aussi l’invalidation probable de la candidature de Ousmane Sonko. Comme quoi, après l’euphorie, attention à la gueule de bois.
SOURCE : TRIBUNE