Abdoul Mbaye recadre Ousmane Sonko suite à ses propos sur le général Kandé et avertit contre des dérives autoritaires
Abdoul Mbaye recadre Ousmane Sonko suite à ses propos sur le général Kandé et avertit contre des dérives autoritaires
La nomination en mai dernier du général Souleymane Kandé en tant qu’« attaché de Défense et de Sécurité » à New Delhi, en Inde, continue de susciter des débats houleux au sein de la classe politique sénégalaise. Pour certains observateurs, cette affectation ressemble à une sanction déguisée, pointant du doigt les « dessous » de cette décision concernant un officier de haut rang. En campagne dans la région de Ziguinchor pour les législatives anticipées du 17 novembre 2024, Ousmane Sonko, Premier ministre et tête de liste de la coalition Pastef, a réagi vivement à cette polémique en mettant en garde les acteurs politiques contre toute utilisation du dossier du général pour des gains politiques.
Lors de son meeting à Ziguinchor ce vendredi 1er novembre, Sonko a fermement condamné ce qu’il perçoit comme une instrumentalisation de la situation en Casamance. « Je voudrais mettre en garde ces apprentis politiciens qui s’agrippent au problème de la Casamance pour avoir de la matière politique. Ils ont parlé du général Kandé en estimant qu’il a fait un travail remarquable en Casamance et qu’il a été sanctionné. Ils faisaient allusion à ma personne, puisque je suis originaire de la Casamance », a-t-il déclaré, affirmant que sa prise de position vise à défendre l’intégrité de l’armée. Le Premier ministre est allé plus loin en lançant un avertissement : « Ils n’ont qu’à répéter ce qu’ils avaient dit pour voir s’ils n’iront pas en prison. »
Ces propos ont immédiatement fait réagir Abdoul Mbaye, leader de la coalition Sénégal Késsé et ancien Premier ministre, qui a vivement critiqué la sortie de Sonko. Sur X (anciennement Twitter), Abdoul Mbaye a adressé un message incisif à l’intention du Premier ministre : « Monsieur le PM Ousmane Sonko, la place publique n’est pas pour s’en prendre à l’honneur d’un militaire, a fortiori d’un général d’armée. Utilisez les procédures idoines qui existent au sein de la grande muette pour traiter et sanctionner les faits gravissimes que vous avez dénoncés. » Abdoul Mbaye a poursuivi en rappelant que la fonction de Premier ministre n’inclut pas le pouvoir de prononcer des peines de prison, en insistant sur le respect des processus juridiques et démocratiques.
Abdoul Mbaye, dans un autre message, a alerté sur ce qu’il considère comme une dérive autoritaire, exhortant Sonko à « prendre conscience » qu’il n’a ni l’autorité d’un procureur ni celle d’un juge. « S’il vous plaît, Monsieur le PM, si le Sénégal est encore une République et non une dictature, au risque de me répéter, prenez enfin conscience que vous n’êtes ni procureur ni juge de siège, et que vous ne pouvez décider d’envoyer quelqu’un ‘pourrir à Reubeuss’ », a martelé l’ancien Premier ministre, exprimant ses préoccupations quant aux risques d’abus de pouvoir.
En parallèle de cette affaire, Ousmane Sonko a également abordé le sujet de la loi d’amnistie votée récemment, dont il a bénéficié, ainsi que d’autres figures politiques telles que le président Bassirou Diomaye Faye. Cependant, Sonko a fait savoir que cette loi, pour lui, n’est qu’une étape temporaire : « Il y a des gens qui ont la mémoire très courte. La loi d’amnistie n’est pas pour nous, et nous allons une fois la majorité obtenue, la retirer », a-t-il promis. Cette déclaration, visant à rassurer ses partisans, confirme l’intention de Sonko de supprimer cette loi dès que sa coalition obtiendra la majorité au Parlement.
Malgré les spéculations, Sonko a précisé que la mutation du général Kandé n’avait aucun lien avec le conflit en Casamance. Selon lui, cette décision résulte d’un rapport dénonçant des tentatives présumées de sabotages de la dernière élection présidentielle, et non d’une sanction liée à des opérations militaires en Casamance.
Cette série d’événements et de déclarations met en lumière les tensions autour de la question sécuritaire et politique à l’approche des élections législatives. Les réactions, comme celle d’Abdoul Mbaye, traduisent les préoccupations au sujet de l’indépendance de l’armée, de la liberté d’expression, et de la démocratie, dans un climat où la frontière entre politique et justice semble de plus en plus floue.