ASSEMBLEE NATIONALE Députés du peuple ou députés de leurs intérêts ?
ASSEMBLEE NATIONALE
Députés du peuple ou députés de leurs intérêts ?
Par El Hassane SALL
« 87% des députés sont endettés » et risquent de ne pas pouvoir payer leur dette si l’Assemblée est dissoute. « Nous avons contracté 50 millions dans les banques. Comment allons-nous payer cela si l’Assemblée est dissoute ». Cette déclaration du député Cheikh Abdou Mbacké Bara Dolly en dit long sur les motivations de nos honorables députés. En somme cela montre que les députés pensent plus à leur ventrequ’aux intérêts de leurs mandants. Que l’Assemblée nationale soit un joujou pour le président de la République qui pourra le dissoudre à chaque fois qu’il en aura envieleur importe peu. Que cette loi soit un recul démocratique ne les émeut guère. Ce qui leur importe, c’est de jouir des privilèges que leur confère leur rang. Légiférer, et contrôler l’action du gouvernement, telle est la mission qui doit guider l’action des députés du Sénégal. Malheureusement le constat est que l’Assemblée nationale a toujours failli à sa mission, car depuis la crise de 1962, elle est devenue une annexe de l’Exécutif qui la manipule à sa guise. Mais cela ne semble guère gêner les députés mange-milliards, qui ne se braquent que lorsque que l’on touche à leurs avantages. Et ils viennent une fois de le démontrer avec ce rejet en force du projet de dissolution. Et ce à quoi l’on assiste aujourd’hui n’est que le prolongement de ce qui a été à l’origine de la brouille entreSenghor et Mamadou Dia. Un conflit qui selon le document « Moniteur Africain du Commerce et de l’Industrie » de la Chambre de Commerce et de l’Industrie de Dakar reposait « essentiellement sur la politique économique du gouvernement mais surtout le sort à réserver aux députés « affairistes » qui avaient commis de nombreux abus. Ces députés avaient profité de l’absence de Mamadou Dia pour s’octroyer des augmentations de salaires, avaient pris des crédits dans les banques qu’ils ne remboursaient pas et des actions dans des sociétés anonymes, directement ou par l’intermédiaire de leurs femmes ou de leurs enfants. Tout ceci étant contraire à la ligne politique du parti, Mamadou Dia leur avait demandé à plusieurs reprises de rembourser leurs crédits et de rendre leurs actions mais en vain. C’est ainsi que profitant d’un voyage de l’ancien Président du Conseil hors du pays, Senghor fini par convaincre les députés de refuser cette politique d’austérité. » C’est en voulant revenir sur leurs acquis que Dia s’est mis à dos les députés qui non seulement avaient rejeté sa requête mais avaient également décidé de voter une motion de censure contre laquelle Mamadou Dia avait tenté de s’opposer et qui lui a été fatale. Donc en votant cette motion de censure, les députésavaient mis en avant leurs propres intérêts au détriment de ceux de leurs mandants. Pour dire qu’hier comme aujourd’hui, les députés ne roulent que pour leurs intérêts et ceux de leur bienfaiteur. Que les lois qu’ils votent aillent à l’encontre des intérêts du peuple qu’ils sont censés représenter leur importe peu, l’essentiel pour eux étant de jouir des privilèges que leur confère leur statut. C’est pourquoi le remplaçant du président Sall devra songer à réorganiser l’Assemblée, nationale, faire en sorte qu’elle puisse refléter les aspirations des populations. Car le constat est que malgré les changements de régime, ce sont les mêmes pratiques qui demeurent. Et aujourd’hui si le pouvoir a tenté de faire passer ce projet de loi controversé avant de le retirer, c’est comme si le pouvoir cherchait à faire payer aux citoyens leur choix qui est d’avoir une assemblée équilibrée. Alors que le peuple souverain a clairement choisi une assemblée de rupture, le pouvoir pour sa part, à défaut de pouvoir reconduire les mêmes reflexes et les mêmes comportements faute d’une majorité écrasante, a choisi simplement de jeter du sable dans le couscous. Mais c’était sans compter avec ces députés accrocs aux privilèges et qui ont décidé de ne pas scier la branche sur laquelle ils sont assis.
SOURCE : TRIBUNE